ARCHIVÉ - L’avenir énergétique du Canada - Scénario de référence et scénarios prospectifs jusqu’à 2030 - Évaluation du marché de l’énergie
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Chapitre 5 : Triple-E
Par « Triple-E » il faut entendre un équilibre entre objectifs économiques, environnementaux et énergétiques. Ce scénario prospectif est donc caractérisé par des marchés de l’énergie qui fonctionnent bien, des ententes internationales de coopération et, des trois scénarios, les politiques les plus strictes en matière de gestion de la consommation.
Aperçu du scénario (2005-2030)
Grandes influences à l’échelle de la planète
Au début de la période visée par ce scénario prospectif, la situation géopolitique se calme. Les prix élevés de l’énergie ont des répercussions sur la demande et les pays en développement maintiennent de forts taux de croissance économique. Ils mènent à :
- un accroissement des investissements sur la scène internationale, dans des zones précédemment jugées marginales ainsi que dans des infrastructures énergétiques;
- la mise en valeur de nouvelles sources d’approvisionnement en énergie;
- un ralentissement des taux de croissance de la demande internationale d’énergie alors que les utilisateurs cherchent de nouvelles méthodes plus efficaces liées à la consommation de cette énergie et que les gouvernements adoptent des politiques de gestion de la demande;
- une collaboration internationale accrue, afin de favoriser l’accès à l’approvisionnement mondial et de coordonner la demande;
- un intérêt soutenu à l’égard des niveaux d’émissions sans cesse plus élevés.
En 2010, les ingrédients favorisant des prix faibles sont en place. La combinaison d’un accès élargi aux sources d’approvisionnement et d’un ralentissement de la croissance de la demande d’énergie mène à un marché énergétique dont l’équilibre est un peu moins précaire. Les prix de l’énergie tombent donc entre 2010 et 2020.
La prise de mesures environnementales se transforme en un phénomène d’envergure mondiale. Le mouvement visant la protection de l’environnement a poursuivi sur sa lancée dans les pays développés et est désormais perçu comme un élément clé pour l’élaboration des politiques. Des revenus accrus dans les pays en développement sont à l’origine de revendications plus vives pour la gérance de l’environnement. En dépit de la chute des prix de l’énergie partout dans le monde, les politiques globales de gestion des émissions et de la demande d’énergie, adoptées pour combattre des prix élevés en début de période, plutôt que d’être abandonnées, sont maintenues en place.
En 2030, le PIB des diverses économies mondiales connaît une croissance de taille, entraînant à sa suite une hausse de la demande mondiale d’énergie. Toutefois, la croissance de la demande aurait pu être d’une ampleur encore plus grande n’eût été de l’évolution des valeurs sociales et des politiques gouvernementales. Même si la situation n’est pas encore parfaite, le monde est sur la voie d’une croissance plus viable. Le lien entre demande d’énergie, émissions et croissance économique s’atténue.
À l’échelle de la planète, l’offre d’énergie continue d’être suffisante pour répondre à la demande, de sorte que les prix demeurent bas. Les réalisations les plus remarquables comprennent un accès élargi aux ressources énergétiques à la grandeur du globe alors que la détente géopolitique se poursuit, l’expansion d’un marché des GNL à grande échelle, et une croissance importante des ressources énergétiques émergentes et de remplacement un peu partout dans le monde. En dernier lieu, la place relative occupée par les sources d’énergie plus propres est toujours plus grande, les approvisionnements en énergie verte étant davantage appréciés.
Conséquences au Canada
Tout comme ailleurs dans le monde, au Canada, le Triple-E est caractérisé par des politiques gouvernementales à long terme visant l’atteinte d’un équilibre entre la consommation d’énergie, les impacts environnementaux et la croissance économique. Les politiques envisagées portent notamment sur[51] :
- l’aménagement urbain (p. ex., exigences relatives à la densité de la population, normes plus strictes pour la consommation d’énergie dans les codes du bâtiment des secteurs résidentiel et commercial, compteurs intelligents, ou soutien à l’endroit de l’énergie à l’échelle des quartiers);
- le prix des émissions, qu’il serait possible d’établir au moyen de divers programmes, notamment d’imposition du CO2, et d’un système de plafonds et d’échanges;
- des normes élargies relatives à l’efficacité énergétique (p. ex., appareils ménagers et commerciaux, de même que moteurs, dont ceux destinés à des applications industrielles);
- des encouragements financiers (p. ex., subventions de modernisation d’immeubles dans les secteurs résidentiel et commercial);
- le financement de travaux de recherche et développement ainsi que de projets de démonstration (p. ex., subventions et subsides en vue du développement de technologies d’accroissement de l’efficacité énergétique ou de réduction des émissions, ce qui peut comprendre la construction, en Alberta et/ou en Saskatchewan, d’un pipeline de CO2 visant à faciliter la capture et le stockage de CO2);
- les programmes volontaires et d’information (montants consacrés à des programmes et des politiques de sensibilisation des consommateurs d’énergie et portant sur les impacts environnementaux des biens et services utilisés);
- des initiatives dans le secteur des transports, y compris l’élargissement des infrastructures de transport en commun, des normes plus strictes touchant les véhicules de particuliers et pour le transport de marchandises, ou des exigences se rapportant à des carburants renouvelables (p. ex., éthanol et biodiesel).
[51] La présente analyse ne comprend pas l’examen d’autres incidences de la mise en oeuvre de ces programmes, touchant par exemple leur rentabilité, leurs effets distributifs ou la capacité concurrentielle. Ainsi, cette série de programmes ne devrait nullement être considérée comme une recommandation quant à l’élaboration d’une future politique. Il s’agit plutôt d’une exploration du potentiel canadien à l’égard de l’efficacité énergétique et de l’intensité des émissions dans le contexte d’un solide soutien sociétal inhérent au Triple-E.
Une offre d’énergie abondante et des prix peu élevés sur la scène internationale sont à l’origine de perspectives où la production de pétrole et de gaz au Canada est la plus faible. Cette situation, greffée à des compromis économico-environnementaux, fait que le scénario prospectif Triple-E est synonyme d’une croissance économique modérée. De la présence de politiques globales sur la gestion des émissions et la demande d’énergie découle, dans le cadre de ce scénario, une stabilisation de la demande et de grandes améliorations pour ce qui est de l’intensité énergétique.
Perspectives macroéconomiques
Les facteurs clés donnant forme aux perspectives économiques dans ce scénario prospectif sont des marchés qui fonctionnent bien à l’échelle de la planète et des programmes ciblant la demande d’énergie et la bonne gestion de l’environnement.
Selon le scénario prospectif Triple-E, la croissance démographique ralentit pour s’établir à 0,8 % par année, ce qui est légèrement supérieur au pourcentage précisé en Maintien des tendances (tableau 5.1). De plus forts taux d’immigration sont envisagés en raison de la nature plus ouverte propre à ce scénario. Malgré une population plus importante, compte tenu des tendances démographiques, la progression de la main-d’oeuvre continue de ralentir pour s’établir à 0,7 % par année en moyenne pendant la période à l’étude. La productivité mesurée en termes de production par employé croît de 1,5 % par année sous la poussée de forts programmes de gestion de l’énergie et de l’environnement qui incitent producteurs et consommateurs canadiens à investir dans du matériel plus efficace.
Tableau 5.1
Variables macroéconomiques clés - Triple-E 2004-2030
1990-2004 | 2004-2030 | |
---|---|---|
Population | 1,0 | 0,8 |
Main-d’oeuvre | 1,3 | 0,7 |
Productivité | 1,4 | 1,5 |
Produit intérieur brut | 2,8 | 2,2 |
Biens | 2,5 | 2,4 |
Services | 3,0 | 2,2 |
Revenu disponible des particuliers | 3,6 | 4,1 |
Taux de change (en $US/$CAN) - moyenne | 74,0 | 98,0 |
Taux d’inflation (en %) - moyenne | 2,3 | 1,8 |
(Taux de croissance annuelle moyen [en % par année], à moins d’indication contraire.) |
Les hypothèses relatives à la population et à la productivité sont à l’origine d’une hausse moyenne du PIB canadien de 2,2 % par année (figure 5.1). Ce pourcentage est quelque peu inférieur à la croissance historique du fait que l’accroissement de la productivité ne permet pas tout à fait de faire contrepoids au ralentissement enregistré à l’égard de la main-d’oeuvre.
Figure 5.1
Taux de croissance réels du PIB - Triple-E 2004-2030
La structure de l’économie canadienne demeure assez stable. Jusqu’en 2030, le secteur des biens continue de représenter un tiers du PIB, le reste revenant aux services. Cependant, la répartition régionale de la croissance économique au Canada change. Les régions manufacturières, en particulier l’Ontario et le Québec, bénéficient d’une forte demande d’exportation de biens manufacturés. Toutefois, les régions productrices de pétrole et de gaz sont confrontées à des prix peu élevés pour les produits de base, ce qui entraîne un ralentissement de la production. Cela est particulièrement apparent en Alberta, dont l’économie croît à un rythme inférieur à la moyenne canadienne.
Prix de l’énergie[52]
Prix du pétrole brut
Le Triple-E suppose une réduction graduelle de la charge supplémentaire découlant des incertitudes liées aux approvisionnements en pétrole[53], ainsi qu’un accès élargi aux ressources pétrolières mondiales grâce à la technologie, aux investissements et à une coopération internationale (figure 5.2). En outre, à la grandeur de la planète, les mesures gouvernementales qui sont prises et l’évolution des valeurs défendues par les consommateurs font que la croissance de la demande est moins forte. Les prix de l’énergie sur la scène mondiale suivent cette tendance et, en fin de parcours, sont beaucoup moins élevés que ceux prévus selon le scénario de référence ou en Maintien des tendances.
[52] En Triple-E, il existe un prix hypothétique pour le CO2 qui rehausse ceux des combustibles livrés aux consommateurs. Ce prix est décrit en détail dans le présent chapitre et des données sur les prix d’utilisation finale sont présentées dans les annexes. Les prix du pétrole et du gaz dont il est question ici sont pour les produits de base et ne tiennent pas compte du CO2.
[53]Accroissement du prix du pétrole rendant compte de l’ampleur du risque d’interruption des approvisionnements. Les situations géopolitiques qui menacent ces approvisionnements poussent à la hausse les prix du pétrole.
Figure 5.2
Prix du pétrole brut West Texas Intermediate à Cushing, en Oklahoma - Triple-E
Prix du gaz naturel
De fortes importations de GNL en Triple-E ont un effet modérateur sur les prix du gaz naturel en Amérique du Nord et font en sorte que ceux au carrefour Henry reculent, pendant la période à l’étude, jusqu’à 5,25 $US/GJ (5,50 $US/MBTU) (figure 5.3). Puisqu’il s’agit du combustible fossile qui a la plus faible teneur en carbone, le gaz naturel a une valeur accrue dans le cadre de ce scénario prospectif et son prix représente 94 % de celui de la quantité de pétrole brut correspondante en termes d’équivalent énergétique.
Figure 5.3
Prix du gaz naturel au carrefour Henry, en Louisiane - Triple-E
Prix de l’électricité
Les pressions sur les prix se font moindres en Triple-E alors que ceux du pétrole et du gaz naturel régressent comparativement aux niveaux atteints au début des années 2000, ce qui a tendance à ramener les coûts vers le bas pour ce qui est de la production des centrales alimentées par des combustibles fossiles. Il y a également déclin de la croissance de la nouvelle production en raison d’une progression plus lente de la demande d’électricité. Ces pressions à la baisse sont partiellement neutralisées par la quote-part plus grande des technologies de production émergentes ou de remplacement, dont les coûts sont plus élevés (p. ex., éolien, hydroélectricité et épuration du charbon), ce qui correspond à une importance accrue accordée aux questions connexes de qualité de l’air et d’émissions de GES ainsi qu’à l’existence de programmes visant à améliorer la situation en ce sens[54].
[54] Les prix de l’électricité selon les régions sont présentés à l’annexe 5.
Prix du charbon
L’équilibre mondial entre l’offre et la demande ressemblant un peu à celui prévu dans le scénario prospectif de Maintien des tendances, le prix du charbon comme produit de base est le même. Cependant, l’intensité des émissions de carbone et les coûts qu’elle entraîne font que les prix du charbon sont moins avantageux comparativement à ceux du gaz naturel. Par conséquent, les acheteurs, qui comprennent les centrales alimentées au charbon et les utilisateurs finals du secteur industriel, paient une prime à l’achat.
Prix des émissions de CO2 et réinvestissement
L’avantage découlant de l’imposition d’un prix sur les émissions est que cette façon de procéder permet de mieux tenir compte de l’intégralité des coûts de production et de consommation de l’énergie. Il existe un certain nombre de programmes et de politiques qui pourraient être mis de l’avant en vue de la définition d’un prix pour les émissions de CO2, notamment une taxe sur le CO2 ou un programme imposant un plafond pour les émissions de GES et créant un système d’échange de droits en la matière. L’imposition d’un prix permet des réductions rentables des émissions, favorise les investissements visant l’élaboration de technologies plus propres et plus efficaces, et ouvre la voie à la création de revenus pouvant être réinvestis dans l’économie dans le but précisément d’atteindre les objectifs.
Dans le scénario prospectif Triple-E, les sommes recueillies au moyen des prix imposés sur les émissions de CO2 servent à soutenir les programmes de modernisation d’immeubles, à financer des travaux de recherche, développement et démonstration devant faciliter le passage technologique prévu dans le cadre de ce scénario, à fournir des capitaux pour des projets précis (p. ex., développement d’une ossature pipelinière en vue de la capture de CO2 et de leur stockage), et à développer des ressources et des programmes d’information. Le développement des ressources ne se limite pas aux campagnes de sensibilisation du grand public. Il comprend aussi la formation d’ingénieurs, d’architectes, d’exploitants et d’installateurs qualifiés. De tels programmes d’information font mieux connaître les questions propres à l’énergie, et mènent à une meilleure conservation de celle-ci ainsi qu’à la création de systèmes énergétiques de plus grande qualité.
Demande d’énergie
La dynamique qui prévaut selon le scénario prospectif Triple-E est une modération de la demande d’énergie dans le contexte d’une activité économique robuste. L’atteinte d’un équilibre, dans ce scénario, entre idéaux économiques, énergétiques et environnementaux nécessite un ensemble complet de politiques ainsi que l’appui des Canadiens. Ces éléments font que la demande demeure pratiquement stable et que sa croissance moyenne est réduite à 0,3 % par année. Les influences fondamentales qui jouent sont la conservation et l’efficacité énergétique, ainsi qu’un passage graduel à des combustibles émettant moins de carbone, comme l’éthanol et le biodiesel[55].
[55] Il est question des sources d’énergie émergentes et de remplacement pour la production d’électricité, comme l’éolien, dans la section sur l’électricité.
Même si les prix de l’énergie sur la scène mondiale sont plus bas en Triple-E, ceux payés pour les combustibles fossiles par les utilisateurs finals sont semblables à ceux prévus en Maintien des tendances car les émissions de CO2 ne sont pas gratuites. Le rajustement pour les émissions est fondé sur la teneur en carbone des combustibles et progresse au fil du temps. Le coût des émissions de CO2 entre 2010 et 2014 est de 15 $/tonne[56]. Ce montant augmente de 10 $ tous les cinq ans, et à la fin de la période à l’étude, le prix des émissions est de 45 $/tonne de CO2. Les sommes ainsi recueillies sont réinvesties dans l’économie afin de faciliter le passage structural requis dans le contexte du scénario prospectif Triple-E.
[56] Ce qui revient, par exemple, à environ 4 cents le litre d’essence.
Tendances de la demande totale d’énergie secondaire
En Triple-E, la demande totale d’énergie secondaire au Canada croît à un rythme de 0,3 % par année pendant la période de 2004 à 2030, ce qui est de beaucoup inférieur au taux de croissance historique de 1,8 % entre 1990 et 2004. Puisqu’il n’est pas aussi facile pour le secteur industriel de passer à des combustibles plus propres et moins coûteux, la demande augmente plus rapidement que dans les secteurs résidentiel et commercial, davantage enclins à réagir aux politiques en place.
Les quotes-parts et les taux de croissance de la demande pour les différents secteurs varient selon la province. Les trois principaux consommateurs d’énergie sont l’Ontario, l’Alberta et le Québec. L’Ontario compte pour 33 % de la demande totale d’énergie secondaire au Canada, l’Alberta pour 26 % et le Québec pour 19 %. Les hypothèses relatives à la population provinciale, au revenu disponible des particuliers et à l’économie, telles qu’elles sont décrites dans la section sur les perspectives macroéconomiques de ce chapitre, ont toutes une influence sur la demande d’énergie des provinces. Les taux de croissance de la demande totale d’énergie secondaire varient selon la région. L’Ontario, le Québec, l’Alberta, l’Île-du-Prince-Édouard, le Yukon et le Nunavut présentent des taux plus élevés que la moyenne canadienne. Partout ailleurs, les taux de croissance sont moins élevés que la moyenne. En fait, les taux de croissance annuels moyens sont négatifs en Saskatchewan, au Manitoba, en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve-et-Labrador, c’est-à-dire que la demande en 2030 est inférieure à celle en 2004. Cette situation est le résultat des tendances démographiques, d’une croissance économique modérée et d’améliorations apportées en matière d’efficacité énergétique.
Figure 5.4
Demande canadienne totale d’énergie secondaire selon le combustible - Triple-E
(Dans « Autres » sont compris le charbon, la coke, le gaz de cokerie et la vapeur.)
La demande d’énergie projetée commence par augmenter rapidement, pour ensuite ralentir et finalement se stabiliser (figure 5.4). Un équilibre précaire est établi entre les moteurs économiques (revenu et PIB) qui poussent la demande d’énergie vers le haut et l’influence dans le sens contraire de différents programmes, politiques et valeurs sociétales.
L’intensité de la demande totale au Canada diminue plus rapidement en Triple-E, soit à un rythme de 1,9 % par année, que le taux annuel historique de 1,0 % (figure 5.5). Cette réduction est principalement attribuable aux audacieuses politiques en matière d’énergie qui sont envisagées dans ce scénario prospectif.
Figure 5.5
Intensité de la demande canadienne totale d’énergie secondaire - Triple-E
Demande d’énergie secondaire dans le secteur résidentiel
Le secteur résidentiel réagit particulièrement bien à diverses politiques. Il a donc plus de facilité à renverser la tendance historique d’une demande accrue découlant d’un état d’esprit de consommation insatiable qui, pour l’essentiel, a annulé les gains passés en matière d’efficacité énergétique. Des règlements uniformes appliqués à la grandeur du Canada font que des technologies et des pratiques auparavant marginales sont désormais d’application très vaste. Conséquemment, plusieurs services à l’intention des utilisateurs finals, qu’il s’agisse par exemple du chauffage de locaux et de l’eau, sont témoins d’une diminution nette de la demande d’énergie entre 2004 et 2030. Les réductions de la demande dans le secteur résidentiel sont rendues possibles en raison de l’intégration de plusieurs politiques clés, dont les suivantes.
- Toutes les maisons neuves répondent aux normes de rendement énergétique R-2000[57] (ou l’équivalent) d’ici 2015 (et le rythme de telles améliorations se maintient jusqu’en 2030).
- Tous les nouveaux appareils ménagers sont certifiés Energy Star® d’ici 2015.
- Des programmes et des politiques à l’appui de la modernisation des maisons existantes au chapitre de l’énergie sont adoptés.
[57] Une maison R-2000 remplit des exigences techniques plus rigoureuses que celles prévues dans les codes du bâtiment.
L’accent est mis sur les politiques de planification urbaine stratégique ou de « croissance intelligente ». Les politiques suivantes figurent au nombre de celles touchant spécifiquement la consommation d’énergie des immeubles résidentiels.
- Un aménagement urbain plus compact qui prévoit notamment un recours accru aux immeubles d’habitation comparativement aux maisons unifamiliales.
- Des murs mitoyens et des systèmes d’exploitation de l’énergie partagés par plusieurs foyers, notamment à l’échelle de toute une collectivité (p. ex., distribution de l’énergie ou chauffage à la grandeur d’un quartier).
La nouvelle norme sur l’habitation en Triple-E est à l’origine d’une amélioration de 30 % du rendement énergétique par rapport à la moyenne historique. La preuve d’une telle amélioration a déjà été faite dans le contexte de programmes du type R-2000, BuiltGreenTM[58] et Energy Star® pour les maisons neuves. Le marché des habitations vertes a récemment connu une vive croissance. Certains éléments portent à croire que le marché soutient comme jamais auparavant cette démarche et dans le scénario prospectif Triple-E, l’hypothèse avancée est que, pour la plupart, les maisons neuves construites le sont en se prévalant des possibilités qui s’offrent à cet égard.
[58] BuiltGreenTM est une organisation sans but lucratif qui fait la promotion de pratiques et de modes de construction d’habitations non dommageables pour l’environnement.
L’objectif de 30 % d’amélioration représente des économies totales regroupant l’enveloppe de bâtiment (isolation/élimination des courants d’air), les fenêtres, les systèmes de chauffage et d’éclairage ainsi que les appareils ménagers. Le système actuel d’évaluation du rendement énergétique des demeures au Canada, soit ÉnerGuide pour les maisons (EGM)[59], est un indicateur utile de la progression à ce chapitre entre 2004 et 2030. Au cours des dernières années, les maisons neuves présentaient une note EGM moyenne autour de 72. L’objectif avancé pour 2015 est de 80 et passe à entre 90 et 100 d’ici 2030. L’union des améliorations des procédés et des technologies permet d’y parvenir. À titre d’exemple, la technologie (c.-à-d. chauffe-eau à condensation) et les procédés (c.-à-d. pommes de douche à faible débit) permettent de réaliser des gains lorsqu’il s’agit de chauffer l’eau. Les améliorations aux procédés accroissent l’efficacité au-delà de ce que, sur le plan technique, le dispositif permet à lui seul. Les économies sont encore plus grandes quand y sont greffées des modifications de comportement. Le scénario prospectif Triple-E prévoit un éthos de conservation à l’origine d’importantes améliorations, même en présence de progrès technologiques de faible envergure.
[59] Selon le système d’ÉnerGuide, une demeure consommant une quantité nette nulle d’énergie produirait une note de 100. Une note se situant entre 90 et 100 est considérée inclure ce qu’il se fait de mieux en matière de technologie du bâtiment, d’appareils ménagers et de systèmes d’éclairage, en plus de profiter d’un certain apport de la part de sources d’énergie de remplacement.
La tendance historique d’amélioration se poursuit dans le cas des gros appareils électroménagers, qui sont dotés des mécanismes nécessaires en vue de leur intégration aux programmes d’intervention en matière de puissance mis de l’avant par les services publics, notamment en vue de la réduction de la charge aux périodes de pointe et dans le contexte de la tarification au compteur horaire. Energy Star* est encore plus présent sur le marché et devient la norme d’ici 2015. La tendance historique d’accroissement de la demande d’électricité de la part d’une multitude de petits appareils électroniques, comme les ordinateurs et autres dispositifs, portatifs et de divertissement, est atténuée par de nouvelles lois internationales limitant à un watt leur consommation d’énergie en veille.
Le rôle de l’hydrogène dans l’avenir énergétique du Canada
Par habitant, le Canada est déjà le plus gros producteur d’hydrogène parmi les pays de l’OCDE, et il est à l’avant-garde pour ce qui est des travaux de recherche et développement en la matière. L’attrait d’une « économie hydrogénée » est phénoménal et le Canada est bien placé pour en tirer parti.
Comme l’électricité, l’hydrogène n’est qu’un mode de distribution de l’énergie. Sa nature se rapproche davantage de celle d’une pile que de celle d’un combustible. La production d’hydrogène se fait au détriment d’autres types d’énergie. Pour le moment, la plus grande partie de l’hydrogène produit l’est à partir du gaz naturel, au moyen d’un processus qui rejette du CO2 dans l’atmosphère. Toutefois, de l’hydrogène pourrait être produit par électrolyse de l’eau au moyen d’électricité. Cette électricité pourrait provenir de centrales nucléaires ou alimentées au charbon ou au gaz, mais la stratégie idéale à long terme serait de relier l’énergie renouvelable (hydroélectrique, solaire ou éolienne) à la production d’hydrogène. À l’heure actuelle, il est moins coûteux de produire de l’hydrogène à partir du gaz naturel que de l’électricité. L’avenir de l’hydrogène dépend de ses applications possibles. Le tableau suivant fait état de certaines applications possibles de l’hydrogène, ainsi que des principaux avantages et obstacles associés à chacune.
Application | Principaux avantages | Principaux obstacles |
---|---|---|
Remplacement de l’essence et du diesel à des fins de transport | Efficacité accrue, diminution du CO2 et meilleure qualité de l’air dans les villes | Remplacement au ajout d’infrastructures pour faire le plein à l’hydrogène, stockage et coûts |
Remplacement du gaz naturel sur les marchés résidentiels et industriels | Dispositifs d’alimentation sans interruption/en veille, CCÉ et remplacement du reformage de méthane à la vapeur pour le raffinage et la valorisation des sables bitumineux | Grands marchés qui ne sont habituellement pas proches des lieux de production, ce qui ajoute aux coûts |
Moyen de stocker de l’énergie électrique tampon | Complémentarité aux sources intermittentes d’énergie (éolienne et solaire) ainsi que possibilité de tirer avantage de la capacité de réserve et en dehors des périodes de pointe du réseau | Concurrence avec d’autres technologies de stockage d’énergie qui progressent rapidement |
Les difficultés que l’industrie doit affronter sont grandes et le recul de 20 % des investissements dans ce domaine ces dernières années, constaté par l’Association canadienne de l’hydrogène, suffit à s’en convaincre. En dépit des coûts très élevés associés pour l’instant à la production d’hydrogène et à son utilisation, les investissements effectués par l’industrie ainsi que par les gouvernements fédéral et provinciaux confirment que l’hydrogène continue d’être très présent dans le contexte des politiques régionales sur l’énergie. Puisqu’il est probable que le large déploiement et l’incidence de ces technologies devront attendre après la fin de la période à l’étude dans le présent rapport, celui-ci n’en fait pas état.
Pour un complément d’information sur l’hydrogène au Canada, le lecteur est prié de consulter le site Web de l’Association canadienne de l’hydrogène [anglais seulement].
D’ici la fin de la période visée par le scénario prospectif, les progrès en matière d’efficacité se font moins imposants. Toutefois, l’adoption des meilleures technologies existantes met de plus en plus à contribution des sources d’énergie émergentes et de remplacement. En Triple-E, cela aboutit à de nombreuses maisons et collectivités consommant une quantité nette nulle d’énergie. L’apport des énergies renouvelables sur place contrebalance les achats d’énergie.
L’énergie (solaire) photovoltaïque (PV), l’énergie thermique solaire et l’énergie géothermique sont intégrées aux systèmes d’exploitation énergétique des demeures, sur le modèle de la gestion de la consommation. Les taux de mise en application sont fondés sur les projections d’associations industrielles. De telles technologies ont connu une croissance rapide ces dernières années, mais à partir de débuts négligeables. Pour en arriver à un nombre optimal de foyers obtenant une note entre 90 et 100 sur l’échelle EGM, les technologies doivent s’améliorer et les coûts diminuer. Cela pourrait se concrétiser au moyen d’investissements proactifs en recherche et développement.
Le rendement énergétique du secteur résidentiel est limité par le grand nombre de maisons plus âgées, et donc moins efficaces, qui continuent d’être présentes pendant des décennies. De gros travaux de modernisation entraînent des perturbations, sont coûteux et ne deviennent rentables que longtemps après la fin de la durée moyenne d’occupation des lieux par les personnes qui les entreprennent. Jusqu’à tout récemment, le nombre officiel de modernisations de foyers sur le plan énergétique qui ont été menées à terme dans le cadre du programme EGM était faible (moins de 10 000 par année). En outre, la principale motivation pour effectuer des rénovations a depuis toujours été de nature esthétique. Dans cette optique, le scénario Triple-E affecte, sous forme de subventions pour modernisation énergétique, une partie des sommes découlant de l’imposition d’un prix sur le CO2. C’est dans une proportion d’environ 5 % que d’anciennes demeures sont modernisées chaque année, ce qui est à l’origine d’une réduction de 18 % de la demande d’énergie. De récentes statistiques indiquent qu’un nombre sans précédent de propriétaires envisagent la possibilité d’effectuer des rénovations dans un proche avenir[60]. Compte tenu de l’état d’esprit qui prévaut en Triple-E, toute occasion de rénovation signifie nécessairement des améliorations au chapitre de l’énergie. Une telle attitude, alliée à des préoccupations en ce qui concerne la qualité de l’air à l’intérieur des demeures ainsi qu’à des encouragements financiers supplémentaires, permet de greffer un volet d’amélioration de l’efficacité énergétique à presque tout projet de rénovation.
[60] Société canadienne d’hypothèques et de logement, L’Observateur du logement au Canada, 2005
La politique liée à la forme urbaine est peut-être celle qui illustre le mieux l’évolution de fond en Triple-E. Elle regroupe les questions d’efficacité énergétique, d’énergie de remplacement, d’aménagement urbain, de distribution d’énergie et de transport. De plus, cette politique est révélatrice des enjeux complexes présents lorsqu’il faut se pencher en même temps sur des problèmes technologiques et sur d’autres de nature structurale (zonage/codes/règlements). La modélisation de la politique a commencé avec un accroissement de la part occupée par les mises en chantier d’immeubles d’habitation (appartements, maisons en rangées ou copropriétés) comparativement à celles de maisons unifamiliales. Depuis toujours, le nombre de maisons unifamiliales mises en chantier a été de loin supérieur à celui des immeubles d’habitation. Ces dernières années, le nombre de mises en chantier d’immeubles d’habitation a beaucoup augmenté[61], et cette tendance se poursuit ou même s’accentue, au point où le nombre de ces immeubles a progressé de 10 % au cours de la période de modélisation.
[61] Société canadienne d’hypothèques et de logement, L’Observateur du logement au Canada, 2005
Une densité accrue permet de réduire la demande d’énergie dans le secteur résidentiel en raison de la présence de murs mitoyens et du partage de systèmes énergétiques. S’ensuivent en outre toutes sortes de possibilités. Une plus forte densité ouvre la voie à de belles occasions en matière de distribution d’énergie et de systèmes énergétiques communautaires. Les systèmes de chauffage à la grandeur d’un quartier, les gros ensembles géothermiques ou de stockage d’énergie et la facturation nette d’électricité permettent de porter le degré d’efficacité bien au-delà des simples dispositifs individuels à l’intention des utilisateurs finals. C’est pour les transports, dont il est question plus loin dans ce chapitre, que la forme urbaine a la plus grosse incidence.
La sensibilisation sous toutes ses formes joue un rôle de premier plan dans le scénario Triple-E. La notion de sensibilisation a fait l’objet d’une modélisation fondée sur les résultats des projets de démonstration liés à l’utilisation de compteurs intelligents, dans le cadre desquels les participants ont réduit leur consommation moyenne d’électricité de 6 % en réaction à l’information mise à leur disposition[62]. Alors que les gains réalisés prenaient surtout la forme d’économies d’électricité dans des maisons existantes, tous les utilisateurs finals ont profité, ne serait-ce qu’un peu, de la notion générale de sensibilisation et de la caractéristique de conservation d’énergie du scénario prospectif Triple-E.
[62] Energy Evolution. « Ontario Government Approves Full Smart Metering Rollout for Chatham-Kent Hydro » (le gouvernement de l’Ontario autorise Chatham-Kent Hydro à déployer des compteurs intelligents à grande échelle), 14 septembre 2006.
Dans l’ensemble, la demande d’énergie secondaire dans le secteur résidentiel au Canada diminue de 0,1 % par année pendant la période de 2004 à 2030 (figure 5.6).
Figure 5.6
Demande canadienne résidentielle d’énergie secondaire selon le combustible - Triple-E
Demande d’énergie secondaire dans le secteur commercial
Dans le secteur commercial, les politiques, possibilités et résultats sont fort semblables à ceux du secteur résidentiel. Il est compréhensible que ces deux secteurs soient fréquemment réunis sous l’appellation d’environnement « bâti ».
C’est au moyen d’une combinaison de politiques identiques à celles adoptées dans le secteur résidentiel que l’écart entre les rendements historique et futur des immeubles dans le secteur commercial se comblera. La plus importante de ces politiques est un resserrement des exigences des codes du bâtiment pour relever le rendement énergétique des nouveaux immeubles jusqu’au niveau de la norme argent de Leadership in Energy and Environmental Design (LEEDMD), soit une amélioration de 25 % à ce chapitre d’ici 2015. Le système LEEDMD est en partie fondé sur l’adoption de diverses technologies du bâtiment non dommageables pour l’environnement. Les promoteurs immobiliers sont libres de choisir, selon le projet, les éléments les plus appropriés parmi toute une gamme de mesures visant l’efficacité énergétique (isolation, fenêtres, ventilation, éclairage et appareils ménagers), de matériaux de construction, de modes d’utilisation des ressources (y compris l’eau) et de sources d’énergie de remplacement dans le but de répondre à certaines exigences minimales.
Depuis peu, dans l’industrie de la construction, des matériaux verts exemplaires sont de plus en plus utilisés[63]. Différents aspects comme l’image de marque, la qualité de l’air à l’intérieur des bâtiments (meilleure productivité/diminution du nombre de jours de congé de maladie) et le prestige constituent autant de force à l’origine de l’intérêt démontré sur le marché. L’effet s’en fait pleinement sentir par suite de l’adoption d’une norme minimale réglementée qui s’applique à la grandeur du pays. En règle générale, les économies d’énergie que de tels immeubles permettent de réaliser comparativement à une construction de référence se situent entre 25 % et 50 %, mais elles ont parfois atteint entre 60 % et 80 %[64].
[63] Voir la liste sur le site Web du Conseil du bâtiment durable du Canada.
[64] Selon les normes minimales recommandées dans le Code modèle national de l’énergie pour les bâtiments (CMNÉB)
La probabilité d’une amélioration significative de l’ensemble des immeubles commerciaux existants est encore plus problématique que pour le marché résidentiel. Il s’agit d’un enjeu de taille compte tenu du fait que 75 % des infrastructures en place en 2030 auront été construites avant 2005. En grande partie, les immeubles au Canada sont relativement âgés[65]. Il est clair que les politiques de subvention à des fins de modernisation ont remporté du succès. Les résultats du Programme d’encouragement pour les bâtiments commerciaux (PEBC) du gouvernement fédéral montrent des améliorations moyennes de 35 % par rapport au Code modèle national de l’énergie pour les bâtiments (CMNÉB) après des travaux de modernisation. Au cours des quelques dernières années, des améliorations de l’ordre de 50 % à 60 % étaient courantes[66]. D’après la modélisation pour le scénario prospectif Triple-E, une amélioration de 20 % est appliquée à 5 % des immeubles existants chaque année. Un certain nombre de « fruits bien mûrs » sont proposés, pour les bâtiments du secteur commercial, dans le contexte d’améliorations aux systèmes d’éclairage (lampes fluorescentes, éclairage à la lumière du jour et détecteurs de présence) et d’améliorations aux dispositifs automatiques et de commande dans les immeubles. Même si ces mesures sont rentables quel que soit le scénario, en Triple-E, elles s’allient en outre à des subventions pour favoriser une démarche systémique à la grandeur des bâtiments.
[65] Selon la Société canadienne de génie civil, 31 % des immeubles ont entre 40 et 80 ans tandis que 28 % ont plus de 80 ans. Carte routière technologique pour les systèmes d’infrastructures civiles 2003-2013, juin 2003.
[66] Ressources naturelles Canada (RNCan), Built Environment Strategic Roadmap - Commercial Buildings Technology Review, Centre de la technologie de l’énergie de CANMET (CTEC), 2007.
Forme urbaine et « croissance intelligente »
Nombreuses sont les villes canadiennes qui ont adopté la notion de « croissance intelligente » de manière à assurer, à long terme, économie durable et pérennité de l’environnement. La croissance intelligente se fonde sur une stratégie foncière et urbaine qui fait la promotion des éléments suivants.
- Aménagement compact et schéma de développement visant une efficacité accrue des déplacements
- Moins grande dépendance à l’endroit du transport automobile
- Projets d’aménagement mixtes et de haute densité autour des infrastructures de transport
- Protection des espaces verts
- Conservation des matériaux, de l’énergie et de l’eau
- Centres piétonniers et sens communautaire plus présent
La forme urbaine est une influence majeure au chapitre de la baisse de la demande d’énergie dans le secteur des transports et de la réduction des émissions de GES. Le fait qu’une petite partie de la population privilégie désormais la marche/l’autobus/le train/le vélo ou même le télétravail équivaut à l’adoption par une grande partie de cette même population de voitures plus efficaces sur le plan de l’énergie. Aucune de ces possibilités n’est laissée pour compte dans le scénario Triple-E.
Une raison expliquant l’escalade de la demande dans le secteur commercial ces dernières années est un recours toujours plus grand aux appareils de climatisation et à la présence de charges branchées en permanence (p. ex., ordinateurs et imprimantes). Les bureaux et les magasins de détail constituent désormais le sous-secteur d’immeubles commerciaux dont la croissance est la plus rapide, et qui plus est, il est presque certain qu’ils seront climatisés et entièrement informatisés. La norme Energy Star* (amélioration de 10 % à 15 % comparativement à la moyenne) pour les appareils ménagers, ainsi que la nouvelle limite universelle de 1 watt pour les appareils en veille, sont efficaces également sur le marché commercial puisqu’elles visent directement une des principales sources de l’accroissement de la demande.
La commutation de combustible au profit de sources d’énergie de remplacement sur place, qu’il s’agisse d’énergie géothermique, PV ou thermique solaire, compte pour presque un tiers des économies totales d’énergie sous forme de combustible fossile en Triple-E par rapport aux données pour le Maintien des tendances. L’apport de la géothermie est de plus ou moins 3 % pour ce qui est des économies en chauffage de locaux. L’énergie thermique solaire touche les sous-secteurs avec fortes charges de chaleur, comme les pavillons récréatifs, les hôtels et les établissements de soins de santé, et elle est alors à l’origine d’économies de quelque 10 % au chapitre du chauffage de l’eau. L’apport de l’énergie PV s’accroît de façon exponentielle mais est de trop faible envergure (moins de 2 %) pour donner lieu à une modélisation individuelle.
En plus des reculs majeurs en raison des coûts de production et de ceux des matières premières, un déploiement intégral nécessite un certain temps pour la mise sur pied des infrastructures, ce qui comprend des normes d’interconnexion et la formation du personnel. Afin de tenir compte de l’influence de tels gains, une prime est ajoutée aux gains d’efficacité des gros appareils électriques qui permettent de déloger une faible quantité d’électricité achetée.
En outre, la production sur place de chaleur et d’électricité dans le secteur commercial prend de l’importance et déloge presque 2 % de la demande totale d’achat d’électricité dans ce secteur en 2030. Cela est rendu possible par l’union des facteurs favorables que sont les améliorations technologiques, la réduction des coûts et un milieu réglementaire qui favorise une distribution d’énergie accrue.
La demande d’énergie secondaire dans le secteur commercial au Canada croîtra de 0,3 % par année pendant la période de 2004 à 2030, ce qui est inférieur au taux historique de 2,5 %, en raison des caractéristiques économiques du scénario prospectif Triple-E et des politiques énergétiques qui sont avancées dans ce scénario (figure 5.7). Dans le secteur commercial, les biocarburants et les sources d’énergie émergentes passent d’une quote-part nulle en 2004 à une de 2 % en 2030 avec la mise en oeuvre de politiques sur l’énergie solaire et géothermique.
Figure 5.7
Demande canadienne commerciale d’énergie secondaire selon le combustible - Triple-E
Demande d’énergie secondaire dans le secteur industriel
Les influences macroéconomiques sont prédominantes au chapitre de la demande industrielle. En Triple-E, l’évolution de la demande varie en fonction du type d’industries, mais les changements les plus profonds prennent la forme d’une réduction visant l’extraction minière ainsi que celle des sables bitumineux et d’autres produits pétroliers. La demande dans le secteur industriel est aussi influencée par les mêmes politiques fondamentales que pour les immeubles commerciaux, y compris l’adoption accélérée de normes sur l’efficacité, des subventions pour la modernisation des installations et du matériel, un soutien à l’endroit des travaux de recherche et développement, de même que l’imposition d’un prix sur le carbone. Pour nombre de raisons, notamment la concurrence qui sévit afin d’attirer des capitaux et les perturbations du flux de production, les améliorations en matière d’efficacité énergétique dans le secteur industriel ne varient pas énormément selon le scénario. Les sources d’énergie émergentes ou de remplacement de peu d’importance ne font pas l’objet d’une modélisation à l’égard de la demande industrielle, mais l’accroissement de taille de la cogénération sur place, c’est-à-dire de la production combinée de chaleur et d’électricité, est inclus dans les gains d’efficacité.
Les systèmes motorisés et la chaleur industrielle constituent des charges universelles dans toutes les sous-sections de ce secteur. Des améliorations en matière d’efficacité énergétique découlant de l’optimisation de la technologie et des procédés mènent à une hausse annuelle d’environ 1 %, ce qui est légèrement mieux que la tendance historique. En Triple-E, la demande industrielle se distingue surtout vers la fin de la période à l’étude alors que les gains d’efficacité montent en flèche compte tenu d’innovations majeures dans les processus utilisés par les industries les plus énergivores. Il s’agit des technologies les moins bien définies qui sont quand même modélisées. Ces technologies comprennent l’amélioration des processus électrolytiques pour la fusion de l’aluminium et du cuivre, la gazéification de la lessive résiduaire dans le secteur des pâtes et papiers, et des technologies perfectionnées pour la manutention des matériaux, permettant d’inclure une part plus importante de matières recyclées à transformer.
Dans le secteur pétrolier et gazier, l’ampleur de la demande d’énergie justifie une analyse distincte de celle effectuée pour l’ensemble des industries. Selon le scénario prospectif Triple-E, toutes les politiques s’orientent de telle manière à établir ou du moins à favoriser un modèle de mise en valeur précis dans le secteur pétrolier ou gazier. La réduction de la demande de produits et la baisse des prix font obstacle à l’obtention de pétrole et de gaz à partir des sources les plus énergivores et les plus coûteuses. Non seulement le scénario Triple-E fait-il en sorte de cibler les gisements à mettre en valeur, mais il dicte aussi la manière de le faire, privilégiant les processus les plus efficaces comme le gaz oxygéné ou la gazéification en vue de la valorisation et de la production de pétrole brut synthétique. Un recours toujours plus grand aux technologies de gazéification dans les sables bitumineux aurait pour conséquence de réduire la consommation de gaz naturel et il serait en outre possible de produire un flux de CO2 pur pour la capture de dioxyde de carbone et son stockage. Cette question est traitée plus en détail dans la section sur le pétrole.
La demande d’énergie secondaire dans le secteur industriel au Canada croîtra suivant un taux de 0,3 % par année pendant la période de 2004 à 2030 (figure 5.8). Les hypothèses de ralentissement de la croissance économique dans ce secteur, alliées à des politiques d’amélioration de l’efficacité, maintiennent la progression de la demande à un niveau plus bas que le taux historique de 1,8 %. La demande industrielle totale augmente plus rapidement au cours de la première moitié de la période de prévision en raison d’une forte croissance dans le secteur pétrolier et gazier. Toutefois, un ralentissement de la demande survient lorsque la croissance dans ce même secteur s’amenuise à la suite de la baisse des prix des produits de base. Hors énergie, la hausse se situe à 0,6 % pendant la période de prévision, ce qui ne suffit pas à continuer de pousser vers le haut la demande industrielle dans son ensemble. Dans ce scénario prospectif, l’exclusion du pipeline de la vallée du Mackenzie attribuable au recul des prix et de l’accessibilité aux meilleures technologies qui soient à l’égard des procédés industriels a une incidence sur la demande.
Figure 5.8
Demande canadienne industrielle d’énergie secondaire selon le combustible - Triple-E
(Dans « Autres » sont compris le charbon, la coke, le gaz de cokerie, la vapeur et le naphte.)
En 2030, les provinces qui consomment le plus d’énergie dans le secteur industriel sont l’Alberta, avec 50 % de la demande industrielle au Canada, l’Ontario avec 20 % et le Québec avec 13 %. Les quotes-parts provinciales varient grandement selon les types d’industries et leur intensité énergétique, ainsi qu’en fonction de la disponibilité des combustibles[67].
[67] L’annexe 2 renferme des renseignements détaillés sur la demande d’énergie par province.
Aliments, fibres et combustibles fossiles
L’éthanol est l’exemple le plus connu parmi les combustibles de source biologique qui font une percée dans les marchés bien établis des combustibles fossiles. L’éthanol n’est qu’un biocarburant parmi tant d’autres dans le secteur de la biomasse en rapide expansion. Les éléments constituant la biomasse (ou bioéconomie) comprennent la bioénergie, les biocarburants et les produits et procédés biologiques. En plus de constituer une solution de remplacement à l’essence, les charges d’alimentation de source biologique peuvent remplacer le diesel ou y être mélangées, servir à la production d’énergie électrique ainsi que dans les systèmes de chauffage, et même être utilisées dans le secteur des produits chimiques pour la production de plastique, de peinture et de détersif.
Le secteur de la biomasse donne à penser que des éléments biologiques (tirés de la forêt et de l’agriculture) pourraient répondre à 20 % des besoins en énergie du Canada d’ici 2030. Déjà, ils sont utilisés pour 60 % des besoins en chaleur et en électricité de l’industrie canadienne des pâtes et papiers. L’attrait des biocarburants, en particulier de l’éthanol, découle du fait qu’ils permettent de réduire les émissions de GES qu’ils assurent la continuité des approvisionnements énergétiques et qu’ils favorisent l’agriculture. Pour toutes ces raisons, le Canada soutient depuis longtemps l’industrie de l’éthanol. Jusqu’à tout récemment, l’éthanol représentait moins de 1 % de l’essence vendue. Des politiques ont maintenant été adoptées à l’appui d’un objectif de 5 % de sa quote-part d’ici 2010. L’activité visant l’accroissement de la capacité de production d’éthanol en Amérique du Nord a été sans égale l’an dernier. Comme il a été possible de le constater récemment aux É.-U., la promotion exhaustive du maïs pour produire de l’éthanol a des répercussions à bien des égards. Notamment, les habitudes établies du commerce d’exportation ont été modifiées ou même renversées, ce qui a eu des conséquences sur les entreprises de production d’aliments et les éleveurs en plus de soulever certaines préoccupations environnementales connexes.
Même si l’agriculture est une industrie assez énergivore, un large éventail d’analyses scientifiques dûment contrôlées ont démontré l’existence d’un gain énergétique net pour l’éthanol produit à partir de fécule de maïs fermentée par rapport à l’essence. (Aux É.-U., ce gain est estimé à environ 38 %.) L’industrie des biocarburants et les décideurs jugent que la situation actuelle est un phénomène transitoire qui mènera à de plus grandes améliorations de l’efficacité et à des coûts plus faibles. Actuellement, il en coûte davantage pour produire de l’éthanol que de l’essence. En vue d’atteindre l’objectif de 10 % fixé dans le scénario prospectif Triple-E, l’hypothèse posée est que la technologie continuera d’évoluer rapidement. L’éthanol cellulosique, c’est à-dire produit à partir de fibres végétales (plutôt que de grains fermentés) arrive à l’étape de la production commerciale et ce sont des sociétés canadiennes qui ouvrent la marche pour cette technologie, laquelle pourrait éventuellement permettre de multiplier par dix les hausses d’efficacité. Par ailleurs, certaines cultures comme celles du peuplier et du panic raide pourraient améliorer le degré d’efficacité de la production. Des processus plus efficaces (y compris la combustion, la gazéification et la pyrolyse) favoriseront eux aussi le développement du secteur de la biomasse dans son ensemble.
Pour un complément d’information :
Le Réseau canadien d'innovation dans la biomasse
U.S. Department of Energy, Energy Efficiency & Renewable Energy, Biomass Program [anglais seulement]
Association Canadienne des Carburants Renouvelables [anglais seulement]
Demande d’énergie dans le secteur des transports
Même si l’efficacité, qui prend ici la forme d’économie de carburant, est le point névralgique de tout débat sur les transports, le scénario prospectif Triple-E tient aussi compte d’un éventail plus large de choix de vie et de valeurs sociétales, qui ont, dans ce secteur, une incidence tout aussi importante sur la demande d’énergie.
Tout part des améliorations apportées aux véhicules à moteur à combustion interne (MCI) ordinaires. L’objectif d’une progression annuelle de 3 % au cours de la première moitié de la période visée par le scénario constitue une amélioration substantielle par rapport au taux historique. Outre les améliorations de l’efficacité attribuables à chaque catégorie de véhicule (p. ex., voitures compactes et sous-compactes, camionnettes, camions de taille moyenne), le secteur des transports réduit de beaucoup sa consommation d’énergie du fait que les conducteurs préfèrent de plus en plus les véhicules de plus petite taille. À mesure que les véhicules plus âgés sont retirés du marché, ils sont remplacés par d’autres qui sont plus efficaces. Cette efficacité accrue peut être le résultat du remplacement d’un véhicule par un autre de même taille mais plus perfectionné sur le plan technologique (p. ex., véhicules hybrides) ou encore par un dont le degré d’efficacité est au moins supérieur d’une catégorie.
Au-delà des améliorations de l’efficacité et des habitudes d’achat, la façon dont les Canadiens se déplacent évolue grandement. À l’origine, cette modification des comportements signifie qu’une partie des personnes qui se déplaçaient seules dans leur véhicule pour se rendre au travail et en revenir utilisent désormais les services de transport en commun. Les villes adoptent allégrement la notion de « croissance intelligente », qui privilégie des densités de population plus élevées et un nombre accru de possibilités pour le transport des personnes. La tendance à l’élargissement incessant de la zone urbaine (à son expansion tentaculaire qui contribue à l’accroissement des VKP des particuliers) au Canada s’en trouverait ainsi modifiée. Le scénario Triple-E tient compte d’une réduction de 5 % des VKP découlant des investissements des municipalités dans le transport en commun. En outre, la densité de population accrue et la présence de quartiers à vocation mixte (habitation/travail) en 2030 font qu’une tranche supplémentaire de 10 % des foyers présente une réduction de 50 % du nombre de VKP.
La composante biocarburant de la politique des transports envisagée en Triple-E prévoit l’application jusqu’en 2030 des objectifs régionaux existants à court terme[68]. La technologie actuelle permettrait d’atteindre l’objectif de 5 % d’éthanol présentement visé. L’atteinte de celui de 10 % d’ici 2030 dépend des percées effectuées au chapitre de la transformation des biocarburants. Par exemple, la production d’éthanol cellulosique augmenterait grandement le rapport entre biomasse et énergie produite. Il en va de même pour le biodiesel, qui est supposé représenter 2 % du volume total de diesel. Le succès de l’industrie des biocarburants au Canada est tributaire de recoupements multiples entre les stratégies énergétiques et environnementales ainsi que d’aménagement rural.
[68] En Ontario, l’hypothèse posée est celle que l’éthanol représentera 5 % du volume (3,4 % de l’énergie) par rapport à toute l’essence consommée dans la province en 2007, ces pourcentages passant respectivement à 10 % et 6,8 % d’ici 2030. En Saskatchewan, l’hypothèse avancée veut que l’éthanol représente 7,5 % du volume (5,1 % de l’énergie) par rapport à toute l’essence consommée dans la province en 2007, ces pourcentages passant respectivement à 10 % et 6,8 % d’ici 2030. Aux fins de la modélisation, l’hypothèse adoptée a été celle d’un volume d’éthanol égal à 10 % du volume total d’essence consommée au Canada d’ici 2030. Par ailleurs, l’éthanol représente 2 % du volume (1,8 % de l’énergie) du diesel total consommé au Canada en 2030.
La demande d’énergie dans le secteur des transports au Canada croîtra de 0,2 % par année pendant la période de 2004 à 2030, ce qui est très inférieur au taux historique et attribuable au ralentissement de la croissance économique, aux améliorations de l’efficacité et aux modifications des comportements (figure 5.9). Les quotes-parts par combustible de la demande au Canada pendant la période à l’étude montrent un important recul de celle de l’essence, qui est le résultat d’une efficacité accrue et des politiques sur les biocarburants posées en hypothèse.
Figure 5.9
Demande canadienne d’énergie dans le secteur des transports selon le combustible - Triple-E
Figure 5.10
Demande canadienne d’énergie dans le secteur des transports selon le mode - Triple-E
Approvisionnement en pétrole
Pétrole brut et équivalents
Avec les prix les plus faibles pour le pétrole et compte tenu aussi de la grande importance accordée à la conformité environnementale, c’est le scénario prospectif Triple-E qui est le moins propice à l’accroissement des niveaux de production pétrolière.
Ressources en pétrole brut et en bitume
Les ressources en pétrole brut et en bitume au Canada sont les mêmes dans le scénario de référence et les trois scénarios prospectifs[69].
[69] Ces ressources sont présentées au chapitre 3 et encore plus en détail à l’annexe 3.
Production totale de pétrole au Canada
En Triple-E, la production gagne autour de 1,6 % par année jusqu’en 2015, puis décroît en raison de la faiblesse des prix et d’une nouvelle imposition toujours plus élevée du CO2. Toutefois, les initiatives gouvernementales en matière de capture et de séquestration du CO2 permettent des niveaux supérieurs de récupération assistée du pétrole. La production atteint un sommet d’environ 589 000 m³/j (3,71 Mb/j) en 2014, pour ensuite reculer graduellement jusqu’à 482 000 m³/j (3,04 Mb/j) en 2030 (figure 5.11).
Figure 5.11
Production totale de pétrole au Canada - Triple-E
Technologies des transports
Pour des réductions valables de la demande d’énergie ou des émissions, des changements dans le secteur des transports sont inévitables. Depuis 15 ans, il s’agit d’un secteur qui a grandement influencé la hausse de la demande et des émissions au Canada. L’accroissement du poids moyen des véhicules, de leur taille et de leur puissance a pratiquement annulé l’ensemble des gains d’efficacité attribuables à des améliorations technologiques. Cependant, il semble que camionnettes et véhicules utilitaires sports (VUS) aient connu leur apogée. Selon RNCan, la quote-part du marché des véhicules neufs occupée par les voitures de tourisme et les camionnettes au pays s’est stabilisée autour de 62 % dans le premier cas et de 38 % dans le second.
La modélisation de la consommation d’énergie dans le secteur des transports passe par l’analyse des types de moteurs et de carburants ainsi que du milieu opérationnel. Les modifications éventuelles au transport par route, qui domine la demande dans ce secteur, ont été examinées à la loupe. Afin d’avoir une idée des changements qui semblent probables dans un proche avenir, il faut savoir par exemple que les É.-U. ont recommandé des améliorations, en matière d’économie de carburant, pouvant devoir atteindre 4 % par année à compter de 2010. Ce pourcentage est plusieurs fois plus élevé que le taux historique.
L’industrie de l’automobile continue de perfectionner le MCI et d’en améliorer le rendement. À cet égard, les progrès réalisés ces dernières années comprennent notamment la désactivation de cylindres, la distribution à programme variable, la transmission à variation continue (TVC) et le freinage par récupération. L’évolution se poursuit sur de nombreuses années et chaque amélioration pourrait être à l’origine d’un gain de quelques points de pourcentage au chapitre de l’économie de carburant. Seul un vaste éventail d’options stratégiques dont de nouvelles habitudes d’achat des consommateurs et de nouvelles techniques de planification urbaine pourra mener à des changements significatifs pour ce qui est des émissions de GES et de la demande dans le secteur des transports.
Les véhicules de l’avenir pourraient être le produit de la convergence de technologies à l’origine d’une révolution au chapitre de la demande d’énergie. Actuellement, les voitures hybrides sont considérées comme une étape vers les véhicules électriques hybrides (VÉH), qui eux mêmes devraient mener aux véhicules à piles à combustible du futur. De tels véhicules, outre le fait qu’ils permettent de « faire le plein » sur le réseau des services publics, donnent aussi la possibilité d’alimenter ce même réseau. Il se pourrait que le parc de véhicules d’une prochaine génération interagisse avec le réseau électrique de telle manière qu’ils emmagasineraient de l’énergie en dehors des périodes de pointe et qu’ils la redistribueraient sur le réseau pendant les périodes de charge critiques.
Pétrole brut classique - BSOC
En Triple-E, la faiblesse des prix du pétrole fait que la situation est la moins attrayante de toutes pour les producteurs pétroliers. Cependant, l’injection de CO2 à grande échelle, favorisée par une « ossature » pipelinière à des fins de transport, va de l’avant avec l’appui du gouvernement (voir l’encadré). Dans l’ensemble, les niveaux de production régressent, mais reprennent une lente croissance vers la fin de la période visée alors que les coûts s’ajustent en fonction de la nouvelle conjoncture sur le marché.
Capture de dioxyde de carbone et stockage/ossature pipelinière pour le CO2 en Alberta
La capture de dioxyde de carbone et son stockage (CCS) ouvrent la voie à d’importantes réductions des émissions de GES par des sources industrielles et découlant de la production d’électricité. Le CCS est un processus en trois étapes.
- Capture du CO2 - Le CO2 qui est habituellement rejeté dans l’atmosphère en tant que sous-produit de procédés industriels est plutôt extrait et comprimé sous une forme qui en facilite le transport.
- Transport du CO2 - Le CO2 capturé est transporté par pipeline ou citerne jusqu’à une aire de stockage.
- Stockage du CO2 - Le CO2 est stocké dans des formations géologiques (p. ex., gisements actifs ou épuisés de pétrole et de gaz, nappes salines en profondeur ou cavernes de sel), dans l’océan ou dans des milieux minéraux carbonatés. Le stockage peut être permanent, ou temporaire jusqu’à une utilisation ultérieure dans le cadre de procédés industriels. Le stockage de CO2 dans des formations géologiques montre de belles possibilités. Les travaux de recherche se poursuivent pour établir la faisabilité du stockage dans l’océan ou dans des milieux minéraux carbonatés. Il semble pour le moment que les procédés industriels constituent des applications peu prometteuses en vue d’importantes réductions des émissions de GES.
L’Alberta est une bonne candidate au CCS du fait de la présence de vastes sources industrielles de CO2 très pur dans le BSOC (p. ex., installations dans la région des sables bitumineux ainsi qu’usines à gaz et de production d’ammoniac, et peut-être même futures centrales alimentées au moyen de combustibles fossiles). Le BSOC est une formation géologique bien connue où les infrastructures en place pourraient être mises à profit en vue du transport et de l’injection de CO2. L’aménagement à grande échelle de pipelines de CO2 qui relieraient les principaux émetteurs industriels de GES aux lieux de stockage à l’intérieur de la province a été proposé. Cette « ossature » pipelinière s’étendrait fort probablement de Fort McMurray et de la région d’Edmonton/Fort Saskatchewan jusqu’aux gisements de Swan Hills et de Pembina. Les gisements de Weyburn et de Midale, en Saskatchewan, pourraient aussi y être greffés. Le CO2 ainsi capturé pourrait servir aux activités de RAH. Toute quantité supplémentaire pourrait être stockée dans le BSOC.
Des problèmes de nature technologique et économique continuent de faire obstacle à la CCS. Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIFC), des réseaux de CCS peuvent être constitués à partir des technologies existantes, mais il n’a pas encore été prouvé que de telles technologies pouvaient être réunies en un ensemble cohérent. Par ailleurs, il existe un écart entre le prix que les industries de RAH seraient prêtes à payer pour le CO2 et celui qui serait demandé afin de pouvoir récupérer les coûts de capture. Il est probable que des politiques gouvernementales seront requises pour combler cet écart.
Ressources sur le Web :
Rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIFC) - Piégeage et stockage du dioxyde de carbone
Site Web du programme de recherche et développement sur les gaz à effet de serre de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) - CO2 Capture and Storage
Gouvernement du Canada - Captage et stockage du carbone | Feuille de route du captage et du stockage du CO2
L’importance accrue de l’injection de CO2, à l’intérieur du scénario prospectif Triple-E, permet de ramener à 4,2 % le taux de diminution pour le pétrole léger classique, lequel taux est de 5 % en Maintien des tendances.
Figure 5.12
Schéma de l’ossature pipelinière pour le CO2 en Alberta
Figure 5.13
Production de pétrole classique dans le BSOC - Triple-E
En ce qui a trait au pétrole brut lourd classique, en Triple-E, la faiblesse des prix et les coûts associés à des conditions plus strictes en matière d’environnement font que la production ne poursuit pas sur sa lancée du début de la période. Dans la même optique, ce scénario étant plus favorable à la protection de l’environnement, la préférence accordée au pétrole brut léger pourrait signifier une précarisation des marchés pour le brut lourd. La production chute à 23 000 m³/j (145 kb/j) en 2030.
Production de brut léger dans l’Est du Canada
Les projections de production pétrolière pour l’Est du Canada sont dominées par les gisements extracôtiers, la production prévue pour l’Ontario étant d’importance mineure.
Les prix prévus pour le pétrole dans le scénario prospectif Triple-E ne favorisent pas l’accroissement de l’offre pétrolière sur la côte Est après 2015. Dans ce même scénario, les gisements satellites ne sont pas inclus et il n’est tenu compte d’aucun autre gisement d’envergure. L’offre atteint un sommet de 65 000 m³/j (410 kb/j) en 2007, pour ensuite décliner jusqu’à 6 700 m³/j (42 kb/j) en 2030 (figure 5.14).
Figure 5.14
Production de brut dans l’Est du Canada - Triple-E
Offre de sables bitumineux
En Triple-E, des prix plus bas pour le pétrole et l’augmentation des coûts, compte tenu de conditions plus strictes en matière d’environnement, ralentissent précipitamment l’activité (figure 5.15). À compter de 2020, seuls les projets existants continuent de produire, et pendant plusieurs années la production décline. Après une période d’ajustement, il y a faible croissance au-delà de 2027. Selon le scénario Triple-E, la production atteint 416 000 m³/j (2,62 Mb/j) en 2030. Les volumes de bitume valorisé totalisent 286 000 m³/j (1,80 million b/j) tandis que le total des volumes non valorisés est de 131 000 m³/j (825 kb/j). Ce scénario ne prévoit aucune production de sables bitumineux en Saskatchewan.
Figure 5.15
Production tirée des sables bitumineux au Canada - Triple-E
Le scénario Triple-E est celui qui accorde le plus de place aux questions d’environnement et à l’existence de programmes gouvernementaux d’encouragement à l’amélioration de l’efficacité énergétique. Dans ce contexte, les améliorations hypothétiques de l’efficacité énergétique sont de 1,5 % par année contre 1,0 % dans les autres scénarios. De plus, les initiatives gouvernementales à l’appui de la capture de CO2 et de son stockage favorisent dans une certaine mesure le passage à la gazéification du bitume afin de produire l’énergie nécessaire à l’exploitation des sables bitumineux, et ce, malgré les faibles prix pour le pétrole. Ce scénario envisage que l’intensité du gaz naturel acheté, de 0,67 kpi³/j qu’elle était en 2005, s’établit à 0,30 kpi³/j en 2030. Au total, le gaz naturel devant être acheté, à l’exception du gaz visant à répondre aux besoins en électricité sur place, augmente quelque peu, et de 0,65 Gpi³/j en 2005, il atteint 0,9 Gpi³/j en 2030, ce qui correspond à un ralentissement de la croissance de la production tirée des sables bitumineux.
Bilans de l’offre et de la demande
Selon le scénario prospectif Triple-E, la production est moindre et le déclin commence plus tôt pour ce qui est du pétrole classique. Au pays, la demande de produits pétroliers augmente et passe de 290 900 m³/j (1,83 Mb/j) en 2005 à 331 800 m³/j (2,09 Mb/j) en 2015, puis à 358 600 m³/j (2,26 Mb/j) en 2030. Davantage d’importance est accordée à la production de carburants de transport plus propres ainsi qu’à l’efficacité énergétique.
Pétrole brut léger - Bilan de l’offre et de la demande
Les exportations de pétrole brut léger montent en flèche pour passer de 110 200 m³/j (694 kb/j) en 2005 à un sommet de 278 400 m³/j (1,75 Mb/j) en 2015. Par la suite, elles régressent jusqu’à 222 600 m³/j (1,40 Mb/j) en 2030, une conséquence directe du rapide repli de la production de pétrole brut léger classique et de l’absence de croissance à l’égard de la production de brut synthétique (figure 5.16).
Figure 5.16
Bilan de l’offre et de la demande, pétrole brut léger - Triple-E
Pétrole brut lourd - Bilan de l’offre et de la demande
Les exportations de pétrole brut lourd en 2005 sont de 149 200 m³/j (940 kb/j), et elles demeurent à ce niveau jusqu’en 2015, année où elles commencent à décliner graduellement jusqu’à 117 500 m³/j (740 kb/j) en 2030 (figure 5.17).
Figure 5.17
Bilan de l’offre et de la demande, pétrole brut lourd - Triple-E
Approvisionnement en gaz naturel
Ressources disponibles de gaz naturel au Canada
Dans le monde du scénario prospectif Triple-E où les prix sont en baisse, il n’est plus rentable de mettre en valeur les plus coûteuses des ressources non classiques. Conséquemment, les ressources restantes de MH, de gaz de réservoir étanche et de gaz de schiste dans l’Ouest canadien ont été comprimées par rapport aux autres scénarios[70]. Comparativement à la situation prévue dans le scénario de référence et le scénario prospectif de Maintien des tendances, les ressources restantes estimatives de MH ont régressé de 26 %, tandis que pour le gaz de réservoir étanche et le gaz de schiste, la régression atteint presque 40 % dans chaque cas.
[70] Tel qu’il est illustré à l’annexe 4.
Par contre, les estimations des ressources restantes de gaz classique demeurent les mêmes ici que dans le scénario de référence ou en Maintien des tendances. Ces estimations sont établies en fonction de la taille minimale du gisement, selon la zone, qu’il est techniquement possible de mettre en valeur d’après l’industrie. Selon la fourchette des prix envisagés, la taille ainsi définie pour le scénario de référence et celui de Maintien des tendances continue de s’appliquer dans le scénario prospectif Triple-E.
Pour ce qui est des projets dans les régions pionnières, encore là, les ressources restantes ne changent pas en Triple-E par rapport au scénario de référence et au scénario prospectif de Maintien des tendances, et elles continuent de tenir compte des meilleures estimations les plus récentes de l’ONÉ quant au gaz commercialisable pouvant techniquement être récupéré, lesquelles estimations s’appliquent selon les fourchettes de prix envisagées. Un problème de taille dans un milieu où les prix sont moindres consiste à surmonter les obstacles techniques et liés aux coûts découlant de l’emplacement, en vue de la construction des infrastructures requises pour avoir accès aux ressources dans les régions pionnières éloignées. Puisque la probabilité de mise en valeur des ressources des régions pionnières d’ici 2030 ne constitue qu’un faible pourcentage de l’ensemble des ressources dans ces régions, un rajustement des estimations à la baisse n’aurait que peu de conséquences sur les perspectives de l’offre.
Production et importations de GNL
Dans ce scénario, la forte croissance de l’offre de GNL sur la scène mondiale fait que le gaz importé devient une solution viable pour répondre à une bonne partie des besoins en gaz naturel du Canada. Les producteurs de gaz au pays pourraient également choisir de profiter, à divers degrés, des occasions qui se présentent à l’égard du GNL sur le marché international. La disponibilité d’abondantes ressources de GNL pourrait éliminer le besoin de chercher à mettre en valeur certaines sources d’approvisionnement au Canada, que ce soit de gaz classique à coût élevé, de gaz non classique ou encore du gaz présent dans les régions pionnières.
Gaz naturel liquéfié (GNL)
En 2005, le Canada et les É.-U. ont consommé 26,3 % du gaz naturel utilisé dans le monde cette année-là. Plus de 98 % du gaz ainsi consommé avait été produit dans ces deux pays. Toutefois, il est estimé que plus de 96 % des réserves de gaz prouvées restantes dans le monde se trouvent à l’extérieur du Canada et des É.-U. Selon les conditions qui prévalent sur le marché, il pourrait être avantageux pour l’Amérique du Nord de s’approvisionner dans une plus grande proportion à partir des ressources présentes ailleurs dans le monde, et donc d’importer de plus grandes quantités de gaz naturel par bateau-citerne, sous forme liquéfiée. Au total, à l’échelle mondiale, les échanges commerciaux visant le GNL en 2005 portaient sur environ 567 Mm³/j (20 Gpi³/j), et selon Tristone Capital, les futurs projets de GNL, qu’ils soient déjà en chantier ou simplement envisagés, pourraient accroître l’offre jusqu’aux alentours de 1 700 Mm³/j (60 Gpi³/j) au cours des dix années à venir.
Si jamais une telle progression se matérialisait, il est possible que la hausse de l’offre de GNL soit supérieure à la croissance de la demande sur le marché. Dans de telles conditions, les fournisseurs de GNL pourraient se voir obligés de se faire concurrence quant aux prix proposés pour la livraison du gaz dans des marchés où l’offre suffit déjà. Toujours selon Tristone Capital, cette situation pourrait ramener les prix jusqu’au niveau moyen des coûts marginaux pour le GNL livré en Amérique du Nord, estimés à l’heure actuelle aux environs de 5,04 $US/GJ (5,30 $US/MBTU). À ce niveau, la production gazière intérieure, qui coûte davantage, pourrait être délogée à la faveur d’importations supplémentaires de GNL. Reconnaissant peut-être la possibilité d’une telle érosion des prix si les différents fournisseurs actuels et éventuels devaient se faire concurrence, certains d’entre eux ont entrepris des discussions très préliminaires sur la possibilité de constituer une organisation semblable à l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) pour aider à la gestion coopérative de l’offre mondiale de GNL.
Il y a eu des augmentations substantielles de la capacité d’importation de GNL en Amérique du Nord, et d’autres travaux sont en cours, notamment pour l’agrandissement de quatre des cinq terminaux existants et la construction de sept nouveaux terminaux (dont quatre sur la côte américaine du golfe du Mexique et deux au Mexique, en plus du projet de CanaportMD, au Nouveau-Brunswick). En tout, plus de 40 terminaux méthaniers ont été proposés aux É.-U. et au Canada, mais il se pourrait bien que certains ne se concrétisent pas. En général, les propositions de terminaux de GNL sur les côtes Est et Ouest des É.-U. ont tendance à soulever davantage d’opposition à l’échelle locale que celles visant la côte du golfe du Mexique.
En dernier lieu, la vaste capacité de stockage gazier souterrain en Amérique du Nord, comparativement aux autres grands marchés pour le GNL (eux aussi principalement situés dans l’hémisphère Nord), pourrait mener à des importations accrues de GNL pendant les mois d’été plutôt que pendant la saison de pointe, lorsqu’il faut répondre aux besoins en chauffage.
Il est prévu que les importations de GNL commenceront en 2009, au rythme de 14 Mm³/j (0,5 Gpi³/j), pour ensuite croître de façon régulière jusqu’à 150 Mm³/j (5,3 Gpi³/j) d’ici 2029, tel qu’il est illustré à la figure 5.18. Ces volumes de GNL seraient déchargés dans un nombre estimatif de sept terminaux méthaniers, dont la capacité individuelle se situe entre 14 et 28 Mm³/j (entre 0,5 et 1,0 Gpi³/j). De tels terminaux d’importation pourraient être construits en des lieux côtiers appropriés en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick, à Terre-Neuve-et-Labrador, au Québec et en Colombie-Britannique. Les importations prévues de GNL équivalent à 50 % de la production intérieure en 2020, et ce pourcentage croît à un rythme constant pour finalement être un peu supérieur à la production à la fin de la période à l’étude.
Figure 5.18
Perspectives de production de gaz naturel - Triple-E
Compte tenu d’un milieu où les prix sont plus faibles et qui donne accès à des importations imposantes, il se peut que les niveaux annuels de forages gaziers au Canada régressent de façon tangible et que les travaux effectués soient plus sélectifs, permettant une efficacité maximale tout en réduisant au minimum l’escalade des coûts. Dans l’Ouest canadien, cela signifierait le forage d’un nombre moyen de 8 000 puits de gaz par année entre 2015 et 2030, un niveau qui se rapproche de ceux qui prévalaient vers la fin des années 1990. En raison de la décroissance des activités de forage, la production de gaz classique dans l’Ouest canadien régresse assez rapidement et chute d’environ un tiers d’ici 2015 et de 80 % d’ici 2030.
Dans la même optique, le fait que les ressources non classiques imposent un effort intensif de forage, elles ne conviennent pas vraiment aux conditions d’activité minimale prévues en Triple-E. La production de gaz de réservoir étanche montre une croissance modeste jusqu’en 2012 avant de décliner graduellement jusqu’à moins de 6 Mm³/j (0,2 Gpi³/j) en 2030. Le gaz de schiste a de la difficulté à être concurrentiel et sa production ne dépasse jamais les 6 Mm³/j (0,2 Gpi³/j). La mise en valeur du MH se stabilise à un niveau un peu supérieur à 28 Mm³/j (1,0 Gpi³/j) entre 2010 et 2019, puis, pendant le reste de la période de projection, ce volume s’effrite graduellement de moitié.
Les travaux de mise en valeur du gaz naturel associés aux projets pétroliers extracôtiers des Grands bancs de Terre-Neuve demeurent pour leur part concurrentiels du fait que, dans une mesure importante, les coûts d’origine à cet égard sont affectés à l’exploitation pétrolière. Les projets dans les régions pionnières les plus isolées, dont ceux liés au gaz du delta du Mackenzie, ne vont pas de l’avant selon le scénario prospectif Triple-E puisque les prix du gaz naturel ne permettent pas de couvrir les coûts de construction du pipeline alors requis, ni ceux des infrastructures d’expédition jusqu’aux marchés de destination.
Bilan de l’offre et de la demande
Figure 5.19
Bilan de l’offre et de la demande, gaz naturel - Triple-E
Des coûts d’approvisionnement plus faibles en Triple-E sont rendus possibles en raison de l’union d’une baisse de la production de gaz naturel au Canada et d’une hausse des importations de GNL. Cette combinaison de facteurs mène à une réduction graduelle de l’offre gazière disponible au Canada, laquelle passe de 481 Mm³/j (17 Gpi³/j) en 2005 à 397 Mm³/j (14 Gpi³/j) en 2015, puis à 283 Mm³/j (10 Gpi³/j) en 2030. Du fait que les É.-U. aussi s’approvisionnent de plus en plus au moyen d’importations de GNL, la diminution de l’offre de gaz naturel au Canada correspond à un recul des exportations visant à répondre à la demande américaine.
Les améliorations de l’efficacité énergétique alliées à des besoins moindres dans la région des sables bitumineux freinent la croissance de la demande de gaz naturel au Canada, qui se situe à peine à 7 % entre 2005 et 2030. Production intérieure et importations de GNL s’unissent pour répondre à cette demande. L’écart qui demeure présent entre l’offre et la demande se situe en moyenne à 62 Mm³/j (2,2 Gpi³/j) entre 2020 et 2030, un volume qui pourrait être destiné aux exportations vers les É.-U.
Selon le scénario prospectif Triple-E, le Canada devient un importateur net de gaz naturel après 2018, ce qui est voulu dans le cadre d’une stratégie visant à réduire les coûts de l’offre gazière en se concentrant sur la mise en valeur de gaz canadien provenant de sources à plus faible coût, qu’elles soient classiques, non classiques ou situées dans des régions pionnières, tout en ajoutant aux approvisionnements par la voie d’importations de GNL, qui abonde. Puisque le marché américain s’approvisionne lui aussi grandement au moyen d’importations supplémentaires de GNL, il y a réduction graduelle des exportations de gaz naturel canadien vers les É.-U., ce qui va dans le sens des règles de comportement habituelles des marchés voulant que tous les participants profitent des coûts les moins élevés possibles. Les conditions de déséquilibre commercial qui devraient être remplies afin de pouvoir demander l’application du critère de proportionnalité au titre de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) ne cadrent pas avec la situation prévalant en Triple-E, qui prévoit de faibles coûts, la stabilité des investissements sur la scène mondiale et des marchés efficaces. Dans le contexte d’une situation internationale moins stable comme celle évoquée dans le scénario prospectif des Îles fortifiées, les exportations de gaz du Canada vers les É.-U. ont généralement tendance à augmenter plutôt qu’à diminuer.
Liquides de gaz naturel
Offre et consommation
En Triple-E, l’équilibre entre l’offre et la demande de butanes se précarise vers la fin de la période à l’étude avec la diminution de la production de gaz naturel dans le BSOC alors que, pour sa part, la demande à des fins de dilution dans les sables bitumineux et pour mélange dans l’essence continue de croître. Ainsi, à compter de 2021, il n’y a plus de surplus d’offre disponible à des fins d’exportation[71].
[71] D’autres détails sur l’équilibre entre l’offre et la demande de propane ainsi que de butanes sont présentés à l’annexe 3.
Bilans de l’offre et de la demande d’éthane
Dans le scénario prospectif Triple-E, la demande est supérieure à l’offre en début de période, ce qui résulte en un manque à combler d’éthane d’environ 2 900 m³/j (18 kb/j) à partir de 2016, lequel manque passe à quelque 23 000 m³/j (145 kb/j) à la fin de la période visée (figure 5.20). C’est en Triple-E que le déficit d’éthane est le plus élevé, surtout en raison d’une offre beaucoup plus faible d’éthane classique. Dans ce scénario, la production de gaz naturel classique du BSOC est la moins importante compte tenu de la baisse des prix. De plus, aucune production d’éthane n’est associée au gaz du delta du Mackenzie puisque le projet pipelinier est jugé non rentable dans ce contexte de prix peu élevés pour le gaz naturel.
Figure 5.20
Bilan de l’offre et de la demande d’éthane canadien - Triple-E
Approvisionnement en électricité
Capacité et production
Selon le scénario Triple-E, les politiques de gestion de la demande d’énergie et l’évolution des valeurs sociétales liées à la consommation énergétique signifient que la demande d’électricité commencera à régresser après 2016. Du fait des coûts associés au contrôle du CO2 et d’autres émissions, les prix à la consommation demeurent élevés, en dépit de la baisse de la demande ainsi que des prix du pétrole brut et du gaz naturel.
Entre 2005 et 2030, la capacité de production s’accroît de 34 %, avec l’apport, notamment, d’un grand nombre d’installations éoliennes et d’autres technologies non classiques qui devraient produire de l’électricité de façon intermittente (figure 5.21). La politique environnementale envisagée dans le scénario Triple-E permet le financement de types de production plus efficaces et le développement de solutions de rechange à la production classique. En outre, elle favorise des applications purement environnementales, comme la CCS. De grands progrès ont été réalisés en termes d’équilibre entre questions économiques, environnementales et énergétiques. À cet égard, le désir de protection de l’environnement fait contrepoids aux préoccupations concernant les coûts liés à la mise en oeuvre des initiatives environnementales.
Figure 5.21
Capacité de production au Canada - Triple-E
Centrales hydroélectriques
Outre celles énumérées dans le scénario de référence, après 2015, les centrales suivantes seront construites : site C à Peace River (900 MW) en Colombie-Britannique, ainsi que Conawapa (1 380 MW) et Gull/Keeyask (600 MW) au Manitoba.
La production hydroélectrique répondra à environ 60 % des besoins en électricité pendant la période de prévision (figure 5.22). Après une augmentation de 10 000 MW entre 2006 et 2015, la capacité de production gagne encore 3 000 MW pour atteindre 82 400 MW en 2030.
Figure 5.22
Production au Canada - Triple-E
Centrales nucléaires
La capacité nucléaire totale progresse de 42 % entre 2005 et 2030, ce qui représente une augmentation de 5 500 MW. Les hypothèses relatives à la capacité nucléaire sont identiques à celles avancées dans les scénarios prospectifs des Îles fortifiées et de Maintien des tendances.
Centrales alimentées au gaz naturel
En raison des prix plus faibles envisagés dans ce scénario et de la montée des préoccupations de nature environnementale, en dehors de l’Alberta et de la Saskatchewan, le gaz naturel est le combustible privilégié pour la production classique.
Centrales alimentées au charbon
La chute de la demande, alliée à la concurrence du gaz naturel et des technologies émergentes, fait que la quote-part de la capacité totale en place des centrales alimentées au charbon passe de 14 % à 4,3 % en 2030. En Alberta et en Saskatchewan, il y a un regain d’intérêt pour ce type de production à compter de 2019, et des centrales au charbon perfectionnées munies de dispositifs pour la capture de CO2 et son stockage entrent en service.
Centrales alimentées au pétrole
La baisse de la demande d’électricité, à laquelle se greffe une commutation au profit du gaz naturel, plus propre, entraîne une coupure de 37 % de la production des centrales au pétrole d’ici 2030 et ce, en dépit de la construction de centrales de cogénération alimentées au bitume d’une capacité de 640 MW en Alberta. En 2020, la production qui était tirée de turbines alimentées au pétrole mises au rancart à Terre-Neuve est remplacée au moyen d’une production par cycle combiné de 180 MW alimentée au gaz naturel.
Technologies émergentes
L’éolien, les petites centrales hydroélectriques et la biomasse sont les solutions privilégiées pour le remplacement des technologies de production classiques, mais il est prévu que les énergies solaire, géothermique et houlomotrice réaliseront des gains importants. Par exemple, l’énergie houlomotrice connaît une croissance substantielle et permet d’ajouter 60 MW à la production sur les côtes Est et Ouest entre 2015 et 2030. Même si elles sont prometteuses, les technologies émergentes ont eu, et continueront probablement d’avoir, peu de conséquences, comparativement aux types classiques de production, pendant la période à l’étude.
C’est l’éolien qui, à ce chapitre, est à l’origine de la plus grande capacité en place selon le scénario prospectif Triple-E, cette capacité atteignant 17 % en 2030. Une telle situation nécessitera des investissements dans les réseaux de transport et les systèmes de commande afin de contrebalancer la nature intermittente de la production éolienne, mais les investissements en question sont jugés valables compte tenu des préoccupations de nature environnementale qui existent.
Exportations, importations et transferts interprovinciaux
De 2006 à 2030, les exportations canadiennes nettes triplent et atteignent 122 000 GWh (figure 5.23). Cette augmentation phénoménale est en grande partie attribuable à la modération de la demande à la suite de la prise de mesures de conservation de l’énergie et à la disponibilité d’hydroélectricité ou d’autres sources de production de remplacement, lesquelles sont privilégiées puisqu’elles contribuent à la réduction des émissions de GES. L’accroissement des transferts interprovinciaux d’électricité (de 23 % pour atteindre 76 400 GWh en 2030) est beaucoup moins marqué mais néanmoins substantiel.
Figure 5.23
Transferts interprovinciaux et exportations nettes - Triple-E
Charbon
Offre et demande
En Triple-E, sous l’effet de préoccupations environnementales, il y a délaissement graduel du charbon thermique à des fins de production d’électricité au profit des centrales alimentées au gaz. Une pression vers le bas sur la demande de charbon est exercée en raison de la mise au rancart de centrales existantes, des programmes de conservation et de gestion de la demande, d’une plus grande efficacité au chapitre de la production d’électricité, et de la décision prise de privilégier des solutions de rechange plus propres. L’hypothèse avancée est que la technologie de CCS devient disponible vers 2020, et ce n’est qu’en Triple-E qu’elle est utilisée.
C’est dans le scénario prospectif Triple-E que la demande et la production de charbon croissent le plus lentement. Au Canada, la production, qui était de 49 Mt en 2015, s’établit à 39 Mt en 2030 en raison de la baisse de la demande de charbon thermique au pays. La demande passe alors de 22 Mt à 7 Mt compte tenu de la préférence accordée aux centrales alimentées au gaz pour remplacer celles, vieillissantes, qui fonctionnent au charbon. En Triple-E, sous l’effet de préoccupations environnementales, il y a réorientation de la politique et délaissement graduel du charbon à des fins de production d’électricité. La demande de charbon métallurgique pour utilisation finale diminue jusqu’à 5 Mt, alors qu’elle était de 7 Mt en 2015, compte tenu du recul de la production des fonderies et des aciéries au pays. La production de charbon métallurgique, quant à elle, augmente quelque peu sous l’effet de la croissance de ce même type d’usines ailleurs dans le monde, mais celle de charbon thermique diminue de façon significative, passant de 18 Mt en 2015 à 6 Mt en 2030. Il est prévu que les importations de charbon, qui atteignaient 10 Mt en 2015, ne seront plus que de 5 Mt en 2030, tandis que les exportations, elles, devraient alors passer à 32 Mt, de 30 Mt qu’elles étaient en 2015. Les exportations nettes connaissent ainsi une croissance modérée de 24 % entre 2015 et 2030 en raison d’échanges internationaux plus intenses et d’une baisse importante des importations de charbon métallurgique et thermique.
En 2015, les importations de charbon thermique ne représentent plus que 54 % de ce qu’elles étaient en 2005 compte tenu de l’élimination progressive de centrales au charbon en Ontario et du remplacement de telles centrales par d’autres alimentées au gaz. D’ici 2030, avec la baisse de la production des fonderies et des aciéries, les importations de charbon métallurgique auront régressé de 40 % par rapport à ce qu’elles étaient en 2015. En Triple-E, les exportations de charbon thermique demeurent faibles.
Épuration de charbon et capture de dioxyde de carbone et stockage
En plus des usines de transformation de sables bitumineux et des installations fabriquant des produits chimiques, les centrales alimentées au charbon pourraient constituer une autre source de CO2 pur pour la CCS. L’Alberta et la Saskatchewan sont de bonnes candidates pour cette technologie puisqu’elles ont accès à du charbon peu coûteux et à des sites, dans le BSOC, où du CO2 pourrait être séquestré dans le cadre de projets de RAH. La Saskatchewan en est d’ailleurs actuellement aux dernières étapes d’élaboration d’une proposition de centrale d’une capacité de 300 MW alimentée au charbon épuré et munie de dispositifs permettant la capture de 90 % de ses émissions de CO2. Si ce projet allait de l’avant, la centrale pourrait entrer en service dès 2012.
Il existe un certain nombre de technologies possibles pour des centrales avec CCS, qu’il s’agisse de laver le CO2 laissé au moment de l’évacuation des gaz après combustion ou de l’extraire du combustible avant même de produire l’électricité.
L’épuration du CO2 après combustion est moins efficace, mais ce processus permet d’exploiter les installations comme s’il s’agissait d’une centrale classique si des problèmes techniques devaient se poser. Pour cette raison, et compte tenu du fait que cette technologie est assez bien connue, la Saskatchewan a privilégié le processus faisant appel à du gaz oxygéné, lequel facilite l’épuration du CO2 après combustion en augmentant la teneur en oxygène de l’air comburant.
En règle générale, l’épuration avant combustion prévoit l’union de la capture de CO2 et de la GICC. Les centrales de GICC transforment le charbon en un gaz de synthèse, soit en un mélange de monoxyde de carbone (CO) et d’hydrogène (H2), qui est ensuite brûlé dans une centrale classique par cycle combiné. La capture de CO2 fait appel à la réaction (H2O + CO -> H2 + CO2) qui permet de produire l’hydrogène gazeux destiné à la combustion et le CO2 pour séquestration. En alliant capture de CO2 et gazéification, l’efficacité est accrue, mais le bon fonctionnement de la centrale dépend de la fiabilité de son dispositif de capture de CO2.
Pour un complément d’information sur les technologies d’épuration du charbon, le lecteur est prié de consulter le chapitre sur le charbon de l’ÉMÉ publiée en mars 2006 et intitulée Technologies émergentes en production d’électricité au www.one-neb.gc.ca.
Émissions de gaz à effet de serre
Dans le scénario Triple-E, un recul de 0,1 % par année des émissions canadiennes totales de GES est prévu entre 2004 et 2030 (figure 5.24). De telles diminutions sont le résultat de politiques gouvernementales de longue date visant l’atteinte d’un équilibre entre la consommation d’énergie, les effets environnementaux et la croissance économique. Les politiques en question se concentrent sur l’efficacité énergétique de l’économie canadienne, notamment en visant une plus faible consommation d’essence par les véhicules et d’énergie par les bâtiments, ainsi que dans le contexte des procédés industriels. Elles visent aussi à aider à la création de combustibles à plus faible intensité d’émissions de GES, par exemple en investissant dans la production éolienne, dans l’éthanol et les biocarburants pour ce qui est du secteur des transports, ainsi que dans l’énergie solaire et géothermique pour les secteurs résidentiel et commercial. Autre composante importante : la séquestration des émissions de GES dans le secteur de l’énergie, qui permet d’éliminer 3,6 % de toutes les émissions au Canada d’ici 2030 et en ramène le niveau à 719 Mt, alors qu’il se situait à 746 Mt.
Figure 5.24
Émissions canadiennes totales de GES selon le secteur - Triple-E
En Triple-E, l’intensité des GES diminue de 2,3 % par année pendant la période de prévision, ce qui est beaucoup plus rapide que le taux historique de 1,1 % (figure 5.25). Cette situation est attribuable aux politiques énergétiques qui ont été adoptées, à une utilisation accrue des sources d’énergie de remplacement et à la séquestration.
Figure 5.25
Émissions canadiennes totales de GES selon le secteur - Triple-E
Dans le cadre du scénario Triple-E, un certain nombre de programmes sont envisagés. L’ONÉ a élaboré ces hypothèses après avoir passé en revue l’information disponible sur les politiques énergétiques et environnementales, actuelles et futures, au Canada et ailleurs dans le monde. Des dizaines de rapports et des centaines de politiques et de programmes ont été évalués pour inclusion éventuelle. En dernier ressort, pour le rapport sur L’avenir énergétique du Canada, les politiques ont été façonnées en fonction des critères qui suivent.
- Vaste acceptation des programmes et des politiques - Les programmes et les politiques existent depuis longtemps, sont fréquemment utilisés, ou ont été sans cesse proposés à titre de solutions éventuelles.
- Politiques et programmes pragmatiques - Les documents semblent indiquer que les politiques ou les programmes auront des incidences mesurables sur la demande énergétique ou sur les émissions à l’intérieur de la période d’analyse choisie ici, ou sont adaptés à partir de ce qu’il se fait de mieux dans le monde à cet égard.
- Expériences canadiennes - Chaque fois que possible, les méthodes employées pour régler des problèmes énergétiques ou environnementaux sont fondées sur des programmes en place au Canada.
- Application étendue - De nombreuses politiques pour chaque secteur de demande ont été intégrées de manière à couvrir un grand nombre des facteurs pris en compte par les consommateurs d’énergie.
- Facilité de quantification et de modélisation - Lorsque diverses politiques répondaient aux critères précités, celle qui était la plus simple à modéliser ou à quantifier était privilégiée. Par exemple, le Canada élabore un système d’échange de droits d’émissions à l’intention du secteur industriel. Afin d’établir un parallèle avec ce programme, des prix pour les émissions ont fait l’objet d’une modélisation. Le système précité pourra être intégré aux analyses futures une fois ses détails connus.
Le gouvernement fédéral a récemment fait part de son intention de réduire de 20 %, d’ici 2020, les émissions de GES au Canada en fonction de leur niveau de 2006. Dans ce scénario, le Canada n’atteint sa cible que partiellement.
Le présent rapport constitue une analyse des avenirs énergétiques possibles pour le Canada. Donc, le rapport se concentre exclusivement sur les réductions des émissions de GES dans le contexte des activités énergétiques au Canada (p. ex., mesures visant à accroître l’efficacité énergétique, amélioration des systèmes de gestion de l’énergie ou investissements dans la CCS). L’analyse ne porte pas directement sur les stratégies de réduction des émissions de GES. En effet, l’analyse ne tient pas compte de deux des sources possibles de réduction des émissions : a) les réductions découlant de mesures prises hors du secteur énergétique, comme la séquestration du carbone en agriculture et en foresterie, et b) celles attribuables à l’adoption de mécanismes internationaux, comme celui pour un développement propre du Protocole de Kyoto, ou à des régimes internationaux d’échanges de crédits d’émission de CO2. La prise en compte de ces deux sources, ainsi que d’autres sources de réduction des émissions, dans le cadre d’une gamme complète de stratégies de réduction des GES, pourrait jouer un rôle de premier plan en vue de l’atteinte de l’objectif canadien de réduction de « 20 % d’ici 2020 ».
Il faut également souligner qu’il subsiste des incertitudes de taille quant à la technologie et à la façon dont les consommateurs réagiront à des politiques de gestion de la consommation ou portant sur les émissions de GES. Tout a été fait pour inclure l’information la plus à jour. Cependant, la situation technologique et en matière de politique climatique évolue rapidement. Si la technologie devait progresser à une plus grande vitesse que ce qui est supposé ici ou encore si les consommateurs et l’industrie devaient faire preuve d’une plus grande volonté de changement quant à leur style de vie et à leurs modes de production, la réduction des émissions de GES montrerait un profil plus dynamique. Par exemple, une des hypothèses avancées est que d’ici 2030, une quantité égale à presque 30 Mt par année est utilisée pour la RAH ou est séquestrée en passant par l’ossature pipelinière de CO2. Cette quantité pourrait être beaucoup plus élevée selon les progrès technologiques réalisés et le degré d’acceptation des consommateurs.
Enjeux du Triple-E et implications
- En Triple-E, une sensibilisation accrue à l’égard des questions énergétiques a modifié en profondeur la façon dont les Canadiens consomment l’énergie. Ces changements influent sur tous les aspects de la vie. Les personnes vivent dans des collectivités plus densément peuplées. Elles ont recours à des modes de transport plus efficaces. L’efficacité des biens et des services est un critère clé au moment de prendre des décisions d’achat. Dans ce scénario, des politiques gouvernementales progressistes favorisent un grand nombre de changements. Par conséquent, bien que les prix à la consommation de l’énergie soient modérés, au même titre d’ailleurs que les taux de croissance économique, la demande globale d’énergie projetée ici est la plus faible parmi les trois scénarios prospectifs envisagés.
- Un accès aux ressources à l’échelle mondiale et une croissance plus modeste de la demande d’énergie se traduisent, dans le scénario prospectif Triple-E, en une abondance d’approvisionnements énergétiques dans le monde. Le Canada s’en remet à des importations de GNL pour une partie importante de ses approvisionnements en réaction à une sécurité accrue des échanges. Cette situation réduit le besoin d’accès à des ressources canadiennes coûteuses ou éloignées et permet une réduction des coûts de l’énergie. En outre, la disponibilité d’approvisionnements pétroliers sur la scène mondiale fait baisser les prix du pétrole, ce qui aplanit les profils de production au Canada, sauf dans les cas d’injection de CO2 favorisée par une « ossature » pipelinière de transport.
- En raison des améliorations de l’efficacité énergétique ainsi que des technologies de CCS, ce scénario est témoin d’une baisse des émissions de GES. Il s’agit d’une constatation importante puisque ce serait là, dans toute l’histoire canadienne, le premier recul à long terme des émissions de GES attribuable à un effort concerté de gestion en ce sens.
- Il faut aussi souligner que les réductions des émissions de GES surviennent malgré la croissance de l’activité économique. Auparavant, émissions de GES et croissance économique étaient intimement liées. Toutefois, les programmes et les politiques mis en oeuvre dans ce scénario atténuent ce lien en permettant à la fois croissance économique et baisse des émissions.
- À certains égards, le scénario prospectif Triple-E en est un qui comporte de gros risques. Ses résultats dépendent dans une grande mesure de programmes ambitieux de gestion de la consommation et de réduction des émissions de GES, de la réalisation de progrès technologiques et de la collaboration entre les nations. L’élimination de l’une ou l’autre de ces conditions met en péril les résultats attendus.
- La mise en oeuvre des politiques et des programmes gouvernementaux avancés dans ce scénario n’est pas une mince affaire. Des débats en profondeur seront requis pour assurer l’atteinte d’un équilibre entre les divers objectifs visés, qu’il s’agisse des réductions des émissions de GES, de la rentabilité des programmes, des incidences sur le plan de la distribution, ou de la réduction au minimum des répercussions en matière de concurrence.
- Un grand nombre de technologies, comme la GICC avec CCS et l’éthanol cellulosique, se doivent de demeurer rentables au fil de leur développement. Par ailleurs, une présence toujours plus marquée de technologies intermittentes comme l’éolien risque de créer des problèmes de fiabilité.
- Dans la même optique, nul ne sait si les attentes à l’endroit d’une collaboration plus grande entre les pays, et l’adoption, par les consommateurs, de nouvelles valeurs modifiant leur style de vie, se matérialiseront.
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